Washington, D.C. – À l’occasion de la Journée internationale des droits de l’homme, le 10 décembre, Doctors Against Forced Organ Harvesting (DAFOH) organise un webinaire avec huit éminents experts qui mettront l’accent sur les valeurs, les principes moraux et l’éthique qui sont essentiels pour l’humanité. Il s’articule autour de l’effort international pour répondre et mettre fin aux prélèvements forcés d’organes destinés aux opérations de transplantation en Chine et ailleurs.

Source: NTD France

Les Instituts Confucius en France, de si discrets relais chinois
Outils d’influence du Parti communiste chinois, les IC multiplient les projets dans les villes moyennes, en vivant dans l’évitement des sujets qui fâchent Pékin.

Par Nathalie Guibert(Angers, Arras, Pau, Rennes, envoyée spéciale)

Le Monde, le 08/07/21

Manifestation contre les Instituts Confucius à Mont-Saint-Aignan en 2020. Extrait du documentaire « Chine, la grande offensive », de Michael Sztanke. BABEL DOC

Les têtards frétillent, tracés à l’encre noire sur la page blanche, sous l’œil de la professeure de calligraphie qui félicite l’enfant. Le petit garçon a eu le courage de se lever tôt, ce samedi
matin de juin, pour suivre le cours de l’Institut Confucius (IC) de Pau. Mais Léo vient de bon cœur avec son frère, assure sa mère, une Chinoise mariée de longue date à un Français.
« C’est leur deuxième maison, ici, leur culture, et je n’ai pas envie qu’ils la perdent. » Vue sous cet angle, l’ouverture dans la capitale du Béarn du dernier-né des instituts de langue et culture chinoises en France, à l’automne 2019, fut une bonne chose.

L’association (100 adhérents) est logée par la municipalité, en plein centre-ville. Elle dispose d’un budget de 80 000 euros, financé à parité par l’agglomération et la Chine.

L’artisane de cette réussite est Chengjie Zhang-Pène, « Jessica » pour tous, ici. Cette dynamique quadragénaire est mariée à un entrepreneur béarnais qu’elle a rencontré à Shanghaï, il y a plus de vingt ans, alors qu’elle était cadre du groupe hôtelier Accor, et pour l’amour duquel, devenue française et mère de deux filles, elle a été jusqu’à se convertir au catholicisme. Sous sa direction résolue, le groupe WeChat des Chinois de Pau atteint
300 membres, celui des mamans, 100. Ici, l’institut est arrivé en terrain vierge. Jessica est chez elle à l’hôtel de ville, où elle fut membre de la majorité municipale entre 2014 et 2020.

Le président du MoDem et maire de la ville, François Bayrou, la salue d’un complice :
« Tiens, tu es là, toi ? »

A Pau, le communiste Olivier Dartigolles, membre de l’opposition, dit « n’avoir pas compris cette passion soudaine de François Bayrou pour la Chine », ce qui n’a, par ailleurs, « suscité aucun débat municipal » – il y a quand même eu une interpellation de l’association France- Tibet sur le non-respect des droits de l’homme par Pékin.

Des incidents sérieux

Créés en 2004 par le Parti communiste chinois (PCC), rattachés à des universités, les Instituts Confucius ont, selon leurs promoteurs, une mission de « soft power » dans le monde, semblable à celle de l’Alliance française ou du British Council. Elle va plus loin, selon le Hanban, le département du ministère de l’éducation chargé de la langue chinoise, qui a précisé leur ambition idéologique : « étendre l’influence du parti » et le « pouvoir adouci de la Chine », puissance autoritaire devenue inquiétante sous bien des aspects.

Le chinois et sa calligraphie, la médecine traditionnelle ou la poésie, piliers de leur activité, sont des axes du Front uni du PCC, sa stratégie d’influence qui englobe tout, du cinéma de propagande aux opérations de désinformation sur le Covid-19. Le président du Hanban, haut responsable du régime communiste, membre du bureau politique, s’est vu confier dans ce cadre par le leader Xi Jinping un défi : « la révolution Confucius », avec l’ouverture d’ici à 2020 de 1 000 instituts. Ils sont aujourd’hui environ 500, implantés dans 146 pays.

En Europe, des incidents sérieux – censure, pressions – ont été recensés, ces dernières années. Début 2019, le Parti conservateur britannique a recommandé de suspendre les 29 accords passés par les universités du pays, dans l’attente d’un audit en profondeur. La Suède, premier pays d’Europe à l’avoir fait, a fermé tous ses Instituts Confucius.

Fin avril 2021, l’IC de Bratislava s’est, lui, tristement illustré : son directeur chinois a dû être licencié après avoir menacé de mort un chercheur de l’Institut d’études asiatiques d’Europe centrale, Matej Simalcik, qui avait travaillé sur l’entrisme de Pékin dans le monde académique slovaque. « Nous avons donné trop d’espace aux Instituts Confucius », a, de son côté, déclaré le ministère allemand de l’éducation, le 29 juin, en annonçant allouer 24 millions d’euros au développement du chinois à l’université.

Aux Etats-Unis, après des années d’attaques antichinoises frontales de Donald Trump, la moitié des 110 instituts du pays ont fermé. Le mouvement a été accéléré par une décision du Sénat d’interdire, au nom de la sécurité nationale, le financement des universités qui hébergeraient de tels établissements.

Lire aussi La Chine et les Etats-Unis en pleine bataille des idées

En France, où Pékin travaille en profondeur son influence dans les villes moyennes, 18 instituts mènent une vie d’apparence tranquille. En dépit d’une année d’enseignement en « distanciel », les IC débordent de projets. Avant l’été, l’heure est à la mobilisation pour l’opération « Pont vers le chinois », un concours qui a déjà récompensé 50 000 étrangers de toutes nationalités par des bourses d’études en Chine.

Une demande « qui n’a pas tari »

Ce début juin, Jessica travaille à l’ouverture d’une antenne à Sciences Po Bordeaux, tout en courant les réunions politiques, car elle figurait, au titre du MoDem, sur la liste de la majorité présidentielle pour les régionales en Ile-de-France.

Jia Baojun, son codirecteur chinois – selon le modèle du Hanban, la direction est partagée et le corps enseignant binational –, envoie chaque mois un « lourd rapport » à l’université partenaire de Xi’an, dont il a été vice-doyen. Jia Baojun a vécu huit ans à Limoges pour décrocher son doctorat de français. Il aurait aimé y créer un IC, mais les places étaient déjà prises dans la région, avec celui de Poitiers, le premier ouvert, en 2005, par Jean-Pierre Raffarin, et celui de La Rochelle. La pandémie de Covid-19 a empêché Jia de retourner voir sa famille depuis deux ans. Sa « nostalgie » est terrible. Mais il passe sur les désagréments liés à la période – « C’est vous, les Chinois, qui nous avez refilé cette saloperie ! », lui a lancé un Palois – pour dire sa fierté d’enseignant. « Nous avons un groupe Facebook de 1 900 followers, le deuxième de tous les Instituts Confucius de France » après celui du Centre culturel de l’ambassade, à Paris.

« La demande pour les cours de chinois n’a pas tari avec le Covid », se réjouit Victor Bernard, directeur à Angers, qui touche un public de 300 élèves dans les écoles, au moyen d’ateliers clé en main sur la calligraphie ou le Nouvel An chinois. Municipalité et région abondent son budget – 359 000 euros, dont 60 % venus de Chine. Sur les rives de la Loire doit également s’ouvrir, en 2022, un campus gastronomique conçu avec l’université de Ludong.

« Les IC sont considérés par les acteurs chinois comme ayant le sceau du parti, avec des cadres validés, ce qui nous permet de mieux faire passer les choses, note Benoît Pilet, adjoint au maire d’Angers et président de l’association. Nous voulons un retour autre que culturel, l’institut doit aussi promouvoir le business. » Ce sera fait fin 2021, avec une formation sur la reprise économique en Chine, coorganisée par le Medef, et un colloque « Sport et tourisme », pendant lequel doit s’exprimer le président du club de foot de Sochaux, propriété… des Chinois.

Stratégie de l’esquive

Sur les murs couverts d’illustrations en mandarin, des photos de l’inauguration des locaux de Rennes en 2008 par un Jean-Yves Le Drian tout sourire rappellent que la « révolution Confucius » fut la bienvenue en France. L’IC dispose aussi d’une antenne à Brest et fait le plein dans la deuxième académie de France après Paris pour le nombre d’étudiants en mandarin. « Depuis quinze ans, les parents voient l’apprentissage du chinois comme un atout professionnel et un élément de distinction. Le raidissement actuel du régime à Pékin ne va pas changer cela », estime son directeur, Blaise Thierrée. Lui compte 150 adhérents en majorité adultes (soit cinquante mille heures d’enseignement délivrées par an) et enseigne à
400 enfants dans les établissements scolaires. Il dispose d’un budget de 360 000 euros, dont 200 000 et deux enseignants payés par l’université du Shandong. M. Thierrée assure n’avoir « jamais entendu chez ces profs un discours structuré sur la Chine ». Selon ce parfait bilingue, le jeu est subtil : « Les Chinois se sont fait biberonner à la propagande et savent parfaitement faire la différence avec leur activité d’enseignants. Ils ont déjà eu des étrangers face à eux et ils ont élaboré leur stratégie d’évitement. Ils ne vont pas commencer par un discours sur le Xinjiang [la province dans laquelle les musulmans ouïgours sont persécutés]. » Sa codirectrice, Sun Yiping, historienne de l’Ancien Régime français, adore les Bretons et leur cidre. Avant de venir, « j’ai suivi un stage d’un mois sur les tâches administratives de direction, avec du tai-chi le matin », confie-t-elle. A-t-elle reçu des instructions sur la façon de présenter la Chine ? « C’est personnel, ça. »

« La Chine évolue en bien », déclare, quant à elle, Jessica Zhang-Pène, en citant la libéralisation de sa politique familiale. C’est la jeune femme qui a monté les deux visites de M. Bayrou à Xi’an, avant d’en organiser une autre avec des entrepreneurs locaux du foie gras.
« En France, on fait de la politique à douze mois, la Chine mène la sienne à trente ans, c’est ce qui a intéressé François Bayrou. Le plus important, c’est de regarder l’évolution du peuple, qui est divers. Le régime, c’est le régime. » Si elle raconte volontiers les souffrances de sa famille durant la Révolution culturelle de Mao, la directrice ne dira pas un mot sur Xi Jinping. Et détourne le propos quand on évoque le sort des Ouïgours : « Je vois plein de musulmans heureux partout quand je vais en Chine. »

Une même phrase revient dans tous les Instituts Confucius, témoin de la stratégie de l’esquive qui leur sert d’ambigu modus vivendi : « On ne fait pas de politique ici, ce n’est pas notre sujet. » « Les IC sont la cible des anti-Chine, on évite les problèmes », confie Jia Baojun, à Pau. « Il y a Pékin, l’ambassade et François Bayrou – c’est quelqu’un, pour l’Institut Confucius ! On est prudents. »

« Ce n’est pas un instrument d’influence mais de découverte des peuples », assène François Bayrou dans sa magnifique mairie donnant place Royale. Le haut-commissaire au plan d’Emmanuel Macron assume le jumelage noué il y a trente-cinq ans par son prédécesseur,
André Labarrère, avec la ville de Xi’an. « C’est très simple, je fais la distinction absolue entre le régime et le peuple. Cette entreprise doit être mise à l’abri des considérations politiques et je n’essaie pas de jeter de l’huile sur le feu. » Le président du MoDem ne peut qu’être vu comme une bonne « prise » par Pékin. Le démocrate a certes refusé d’adresser une lettre de félicitations au PCC pour ses 100 ans, comme l’ambassade l’avait suggéré aux partis français, mais il jure : « Je ne vois pas le PCC quand je vois l’Institut Confucius, il ne fait aucune propagande. Je serai hypervigilant. »

Des directeurs sous surveillance

L’IC de Paris, rattaché au département de la formation continue de l’université Diderot en 2006 et jumelé avec Wuhan, a refusé de répondre au Monde – comme celui de Metz. Avec 600 inscrits, il occupe pourtant la place la plus enviée, installé aux côtés des prestigieuses études chinoises françaises portées par l’Université de Paris et l’Inalco. « Le poste de Paris est parmi les plus difficiles à avoir ! », confirme Li Bingzhi, son ancienne directrice chinoise, qui poursuit des études d’informatique en France. Comme tous ses collègues, elle évite de prononcer les mots « Xinjiang » ou « Hongkong » durant la conversation, des sujets au mieux qualifiés de « polémiques » dans les instituts.

La partie française avoue ignorer les liens de ses collègues avec le pouvoir chinois. Gilles Guiheux, qui a codirigé l’institut parisien de 2011 à 2014, a « d’abord eu un collègue qui tremblait dès qu’on ouvrait la bouche et à qui j’ai fini par dire : “OK, on ne fera rien sur Taïwan ou le Tibet.” Le suivant s’organisait pour que son rapport annuel au Hanban présente bien, quitte à s’arranger avec la réalité, et cela s’est mieux passé. »

Leurs rapports de gestion peuvent être formels, tout comme la convention qui les lie aux universités chinoises – « satisfaire la demande sans cesse croissante d’apprentissage de la langue », « la compréhension mutuelle du peuple français et chinois », dit celle de Rennes. Les directeurs restent néanmoins sous surveillance. En 2012, lors de la conférence annuelle des cadres Confucius à Pékin, un raout « corporate » de plusieurs milliers de participants abreuvés de discours officiels, M. Guiheux a été pris à partie par la directrice du Hanban, Xu Lin, en raison d’un projet culturel lié à la démocratique île de Taïwan : « Ah, c’est vous qui avez signé avec Taïwan ! » Pour cet universitaire, qui regrette d’avoir laissé jouer un opéra universitaire « nullissime » dans ses locaux, « le problème des Instituts Confucius est qu’ils diffusent une image fausse de la Chine. Mais nous en sommes coresponsables ».

Les acteurs du réseau français adhèrent à l’idée d’une puissance chinoise irréfrénable. « La Chine va vite, elle nous dépasse en matière de technologie. Elle va devenir une superpuissance, la question est de savoir comment mieux travailler avec elle », justifie Léon Laulusa, codirecteur français du Business Confucius de l’Ecole supérieure de commerce de Paris. Celui-ci a été ouvert en 2018 avec l’université des langues étrangères de Pékin, et, souligne-t-il, « le feu vert du Quai d’Orsay ». Il compte 250 étudiants, un budget de 300 000 euros, dont le tiers vient de Chine. A propos du Xinjiang, il répond : « Est-ce qu’aborder ici ces thématiques va faire avancer le débat ? L’éthique des affaires est primordiale pour nous, mieux vaut la traiter dans le cadre des cours de l’école. »

Un des responsables rencontrés par Le Monde assure « être tous les ans contrôlé par le renseignement territorial, qui cible tous les étudiants et les enseignants », et que « jusqu’à présent il n’y a pas eu d’alerte ». Les affaires étrangères, elles, refusent d’intégrer les IC dans le réseau de la coopération décentralisée qui associe universités, entreprises et associations.

Tentative d’entrisme

Trois fermetures ont eu lieu en France, à Lyon, Nanterre et Toulouse. « Pour des raisons de personnes », dit-on dans le réseau. En 2013, la patronne du Hanban avait en fait exigé la tête du directeur français du centre de Lyon, Gregory Lee, et suspendu son financement. M. Lee a expliqué avoir refusé les « demandes nouvelles et exponentielles » de Pékin, notamment le fait que l’IC codélivre des diplômes avec l’université. Une vraie tentative d’entrisme qui a servi de leçon à tout le monde.

Un incident, le premier à Angers, a marqué le Printemps des poètes en 2020. Plusieurs directeurs chinois du réseau français se sont mobilisés quand M. Bernard a voulu mettre à l’honneur Fang Fang, une écrivaine célèbre, autrice d’un journal de bord du confinement à Wuhan et mise au ban par Pékin. « Ma directrice chinoise m’a dit que ce n’était pas une bonne idée de la promouvoir. Certains voulaient la censurer. Nous ne l’avons pas retirée de notre site. » Après cela, la ville a prévenu ses interlocuteurs chinois qu’en cas de censure préalable elle arrêterait son festival de jeunes réalisateurs, Premiers Plans. Il y a cependant peu de risque que cela arrive, convient l’adjoint au maire, car « en ce qui concerne les événements culturels organisés ici, tout est beau et lisse ».

En France, les incidents sont restés rares ; les stratégies d’évitement fonctionnent. « Jusqu’à présent, les IC ont adopté un profil bas, avec la volonté de développer la culture chinoise là où il n’y avait rien, comme à Pau ou à la Rochelle. La réaction de l’ambassade pour punir des chercheurs, comme elle l’a fait avec Antoine Bondaz de la Fondation pour la recherche stratégique [traité de “petite frappe” sur Twitter par l’ambassade en mars], est une nouveauté.

Mais cette diplomatie “guerrière” ne se sert pas des IC – ce serait se tirer une balle dans le pied », estime le président de l’Inalco, Jean-François Huchet.

Lire aussi « L’offensive de Pékin contre les libertés académiques appelle des mesures défensives »

« Des conférences très ouvertes ont été organisées par les instituts », salue-t-on même à l’Inalco. La liste des ouvrages recommandés par le réseau français est parfaitement éclectique, allant de Fang Fang à Wang Anyi, romancière classique, en passant par un opus sur les queers. « Nous n’invitons des artistes que parce que nous pensons qu’ils ont des choses à
dire », peut affirmer M. Thierrée, à Rennes. « Le projet Confucius en France est bien conduit pour développer une influence intelligente, en profondeur, s’appuyant sur des gens comme moi qui croient en la culture et pensent qu’il ne faut pas s’arrêter à Xi et au PCC pour parler de la Chine », affirme-t-il. Selon lui, la situation des instituts est « précaire ». Il dit avoir « des lignes rouges » : « une condamnation de la Chine pour génocide des Ouïgours » ou
« un nouveau Tiananmen ». Et il suffirait que le ministère des affaires étrangères l’ordonne pour que tous ferment.

Pénétrer sans bruit l’université

En 2020, Pékin a réformé le Hanban. Ce département, qui focalisait les critiques internationales, a disparu au profit de deux entités : d’un côté, la Fondation internationale pour l’éducation, qui gère la marque IC et délègue la signature des conventions aux universités ; de l’autre, un Centre pour la langue et la coopération éducative, l’opérateur. Cet habile découplage du pouvoir central fait que des Pyrénées à l’Alsace, de la Bretagne à La Réunion, tous ne réfèrent plus qu’à leur université chinoise – placée sous la coupe du PCC. Les relations s’en trouveraient simplifiées, mais la réforme n’apparaît pas encore clairement sur le terrain

Loin de la diplomatie agressive des « loups combattants », mise en œuvre par les ambassadeurs chinois en Europe, la réussite des IC de France peut, du point de vue de Pékin, se mesurer sur un autre plan : leur capacité à pénétrer l’université, sans bruit. Le réseau Confucius demeure un angle mort du ministère de l’enseignement supérieur. Contacté par Le Monde, celui-ci renvoie « aux rectorats en cas de dérive ». « Cela n’a jamais été un sujet et l’université française a toujours eu des rapports très ouverts avec l’ambassade de Chine », relate Roger-François Gauthier, inspecteur général à la retraite. « Il n’y a jamais eu de mission de l’inspection générale », confirme Marc Foucault, qui a rejoint l’inspection après avoir dirigé les relations internationales du ministère. Au mieux, « une attention pour que les IC ne supplantent pas les enseignements des autorités françaises ».

Lire aussi Censure en Chine : la volte-face des Presses universitaires de Cambridge

Département à part entière de l’université d’Artois, l’IC d’Arras, conventionné avec Nankin, infuse dans tout le Pas-de-Calais – jusqu’au Louvre-Lens, qui prépare avec lui une exposition du peintre Pan Gongkai, président de l’Académie centrale des beaux-arts à Pékin. Il a conforté son rôle en formant chaque année les directeurs Confucius d’Europe à la didactique du chinois. Il rend aussi de grands services aux 200 étudiants du tout jeune département d’études chinoises de l’université : test de mandarin HSK (l’équivalent du TOEIC pour l’anglais), bourses en Chine, compléments de cours et stages.

« L’institut est un catalyseur de relations et d’activités, une structure qui permet à l’université de rayonner un peu plus », se réjouit son président, Pasquale Mammone. Ce mathématicien se rend deux fois par an à Nankin, où il entretient des coopérations avec ses collègues des départements intelligence artificielle et chimie verte. « L’IC me permet d’accéder au recteur à chaque fois que j’y vais. Nankin a des moyens phénoménaux, beaucoup de mes collègues aimeraient les avoir. » Depuis 2020, l’IC d’Arras offre même la possibilité de passer un diplôme universitaire (DU) de chinois des affaires, un projet conçu pour des chefs d’entreprise, mêlant ses enseignants à ceux de la fac. L’intrication est bien réelle.

Vigilance croissante

« On essaie d’unir nos forces. Nous avons des moyens. L’université, en difficultés matérielles, a un public », résume très bien Blaise Thierrée, à Rennes. Le durcissement du régime de Pékin suscite cependant une vigilance croissante de la part des universitaires français.
« Personne ne croit que la réforme du Hanban est une décentralisation », note Cédric Laurent, directeur des études chinoises de l’université Rennes-II.

« L’institut doit rester une association hors de l’université, nos relations se limitant à organiser des événements en commun, généralement à notre initiative », insiste-t-il. Et ce, d’autant plus, dit-il, que l’IC de Rennes est rattaché à l’université de Shandong, très proche de la défense et de la sécurité publique chinoises. Les échanges de professeurs, pratiqués dans les débuts, ont été vite arrêtés. « Cela posait des problèmes, car leurs enseignants étaient formés à une certaine idéologie. » Autrement dit : le parti avant la liberté académique.

Pour maintenir un équilibre, l’université Rennes-II s’est tournée vers Taïwan, qui lui finance un demi-poste d’enseignant, autant que vers Pékin, qui lui envoie un lecteur de Shanghaï. En matière d’enseignement du chinois, « les Taïwanais voient l’occasion de fournir une alternative, car les IC sont sévèrement critiqués à l’étranger, mais ils n’en ont pas les
moyens », explique Antoine Bondaz, de la FRS. L’université Diderot « a bien signé un accord pour mettre en place une Taiwan Academy, explique Béatrice L’Haridon, maîtresse de conférences, mais il est au point mort, après de longues hésitations sur la forme de cette coopération ». Car le gouvernement taïwanais ne peut se permettre qu’elle apparaisse comme un concurrent direct de l’Institut Confucius.

Nathalie Guibert (Angers, Arras, Pau, Rennes, envoyée spéciale) du Lemonde

Les langues se délient en France, au sujet de la menace communiste chinoise. Il y a d’abord eu le rapport de l’IRSEM, le Think Tank de l’École militaire, qui alertait sur les influences dangereuses du PCC sur la scène mondiale. Et deux semaines plus tard, la publication d’un rapport du Sénat a mis en lumière la dangereuse ingérence du PCC dans les milieux universitaires français. Son auteur, le Sénateur André Gattolin a commenté le rapport dans l’émission de NTD Esprits Français, samedi. Voici des extraits de son intervention.

Plusieurs centaines de personnes ont défilé samedi à Paris pour réclamer la reconnaissance du « génocide » en Chine.

Discours de Mme Frédérique Dumas hier à la Manifestation
Discours d’un Député belge
Manifestation Ouïghours à Paris le 2 Octobre 2021

En finançant l’entreprise Huawei et les Instituts Confucius, Jean Rottner et la région Grand Est peuvent-ils être considérés comme complices du génocide et des crimes contre l’humanité commis en Chine ?

Jean Rottner soutient l’entreprise Huawei malgré son implication dans le génocide des Ouïghours en Chine et constitue une menace pour la sécurité intérieure.

De l’argent public pour Huawei qui massacre les Ouïghours ?

Le Président de la région Grand Est, Jean Rottner, a décidé le 12 février 2021 de soutenir et financer l’installation de l’entreprise chinoise Huawei à Brumath (Alsace) avec de l’argent public (800 000€). Alors même que Jean Rottner est pleinement conscient que l’entreprise Huawei est complice du génocide et des crimes contre l’humanité (esclavage, surveillance de masse, déportation…) visant les Ouïghours. Le député européen Raphaël Glucksmann lui a ainsi adressé une lettre (également partagée sur Instagram) le 24 février pour lui expliquer les enjeux de sa décision, et lui demander de revenir sur celle-ci en l’annulant. Il a également adressé une question aux citoyen·ne·s du Grand Est, puisqu’il s’agit d’argent public : voulez-vous financer une entreprise qui massacre des Ouïghours ?

En effet, l’entreprise Huawei a, en plus de bénéficier du travail forcé dans les camps de concentration, développé une technologie de reconnaissance faciale ethnique qui envoie des alertes « Ouïghours » pour aider le régime à traquer les Ouïghours et les envoyer dans ces camps où de nombreuses violences leur sont infligées : tortures, viols et agressions sexuelles.https://cdn.embedly.com/widgets/media.html?type=text%2Fhtml&key=a19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07&schema=twitter&url=https%3A//twitter.com/charlesrollet1/status/1336341099917406214&image=https%3A//i.embed.ly/1/image%3Furl%3Dhttps%253A%252F%252Fabs.twimg.com%252Ferrors%252Flogo46x38.png%26key%3Da19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07

Ce sont pour toutes ces raisons que la chanteuse Zara Larsson, le département du Val-d’Oise, et le footballeur Antoine Griezmann ont rompu leur contrat avec Huawei.

Des milliers de personnes se sont mobilisées sur les réseaux sociaux pour alerter le département du Val-d’Oise et leur demander de mettre fin à tous leurs contrats avec Huawei. Des députés européens, français, ainsi que des élus locaux ont également pris position.
Après avoir été alerté sur l’implication d’Huawei dans le génocide, Antoine Grizemann a publié ce message sur Instagram pour annoncer qu’il rompait son contrat avec l’entreprise.

Mais ce ne sont pas les seules accusations dont fait l’objet Huawei. Un article scientifique publié par Christopher Balding en 2019 compare, à la suite d’une fuite de données, le parcours professionnel des employés d’Huawei et se rend compte qu’ils ont, pour beaucoup, travaillé pour les services de renseignements chinois. Huawei est aussi accusée d’espionnage au service du régime chinois : outre les États-Unis, Huawei a ainsi été bannie des réseaux de télécommunications du Royaume-Uni pour des raisons de « sécurité nationale » et également de Suède après l’évaluation des autorités militaires et du renseignement.

Plus récemment, un rapport resté secret depuis 2010 a été rendu public, et affirme que l’entreprise Huawei aurait eu accès aux données de l’opérateur KPN aux Pays-Bas, leur permettant ainsi d’espionner les conversations des membres du gouvernement. À noter qu’en Chine, une loi de 2017 sur le renseignement national oblige toutes les entreprises chinoises à coopérer avec les agences de renseignement chinoises.

Après une mystérieuse cyberattaque qui a paralysé les universités ainsi que le Parlement belge, alors que ce dernier devait justement débattre d’une résolution pour reconnaître le génocide, la Belgique a également annoncé que les entreprises chinoises représentaient une menace pour la sécurité intérieure dans la mesure où elles ont l’obligation d’ouvrir des postes à des agents des renseignements chinois.

En ce sens, le député Raphaël Glucksmann avait également rappelé au président de la région Grand Est, Jean Rottner, que « l’usine que Huawei veut construire à Brumath se situe au milieu des unités de l’armée de Terre dédiées au renseignement. Selon des spécialistes, le site de Brumath est en France l’un des secteurs qui concentre le plus d’unités militaires — qui plus est sensibles pour certaines — au kilomètre-carré. »

Manifestation contre Huawei et l’Institut Confucius, le 18 mars 2021 à Strasbourg.

Les universités du Grand Est sont-elles aussi complices du génocide ?

L’Université de Lorraine et l’Université de Strasbourg ont également été pointées du doigt pour leur lien avec la Chine.

Le Point, 25 février 2021.

Dans un article publié le 25 février 2021 dans Le Point, Jérémy André s’intéresse à l’influence de la Chine sur les universités. On y apprend que Christian Mestre, ancien doyen honoraire de la faculté de droit de Strasbourg et déontologue de l’Eurométropole de Strasbourg (qui a démissionné à la suite de cet article) faisait régulièrement des voyages en Chine, et avait promu la politique concentrationnaire et génocidaire du régime chinois.

De façon plus générale, cet article alerte sur la présence des Instituts Confucius au sein des universités françaises. Officiellement, ils ont pour mission de partager la langue et la culture chinoise. Officieusement, ce sont surtout des « centres d’espionnage et de propagande »Comment a-t-on pu accepter qu’un régime totalitaire puisse infiltrer les universités ? Rappelons que les Instituts Confucius, tout comme l’entreprise Huawei, sont soumis aux lois chinoises. Ils doivent donc obéir à tous les ordres du Parti Communiste et collaborer avec les services de renseignements chinois.

« Tous ceux qui suivent des cours d’un Institut Confucius sont susceptibles de devenir des agents d’influence ou d’être utilisés, parfois même malgré eux, par le service de renseignement chinois » Michel Juneau-Katsuya, ex-agent du renseignement du SCRS.

Ce scandale n’est pas nouveau, puisqu’en juin 2014, l’Association américaine des professeurs d’université (AAUP) avait déjà appelé les universités à mettre fin à leur partenariat avec les Instituts Confucius car ces derniers « fonctionnent comme un bras armé de l’État chinois et sont autorisés à ignorer la liberté académique ». Depuis 2014, ces instituts sont considérés par la communauté scientifique comme étant des « Chevaux de Troie » (expression reprise dans Le Monde en 2015 et dans Le Point en 2021). Un article scientifique publié par Marshall Sahlins en 2015 concluait aussi que les Instituts Confucius dissimulent, derrière une apparence inoffensive, une mission plus douteuse de propagande et d’actions visant à promouvoir l’influence du gouvernement chinois.

« Les Instituts Confucius sont une menace pour les principes de liberté et d’intégrité académiques qui sont à la base de notre système d’enseignement supérieur […] Si Les universités veulent maintenir les principes académiques sur lesquels elles sont fondées, elles doivent mettre fin à leurs relations avec les Instituts Confucius et reprendre leur obligation de respecter l’idée de l’université. » (Marshall Sahlins, Université de Chicago, 2015)

Manifestation contre les Instituts Confucius, le 20 octobre 2020 à Mont-Saint-Aignan.

Les États-Unis ont ainsi déjà fermé 40 Instituts Confucius car ils représentent un danger. En 2020, les États-Unis ont également restreint l’accès des étudiants chinois, et classé les Instituts Confucius comme étant une « mission diplomatique » (de la même manière qu’une ambassade ou un consulat), ce qui leur permet de les placer sous haute surveillance. Des incidents se produisent également dans tous les pays, l’article publié dans Le Point en cite quelques-uns :

« Les campus australiens (qui accueillent 260 000 étudiants chinois !) se déchirent entre pro et anti-Chine. À Brisbane, en juillet 2019, un sit-in d’une poignée d’étudiants soutenant la démocratie à Hongkong a été violemment pris à partie par des centaines d’étudiants chinois et des gros bras envoyés par le consul de Chine. Cet incident, et une cascade de révélations, a poussé Canberra à lancer une enquête parlementaire sur les ingérences étrangères dans ses universités. En Europe, la Belgique a expulsé en 2019 le directeur de l’Institut Confucius de la VUB (l’Université libre de Bruxelles flamande), accusé d’espionnage. » (Jérémy André, Le Point, 2021)

Au total, les pays européens ont déjà fermé 10 Instituts Confucius. En Suède, ils sont désormais totalement interdits. Les Instituts Confucius ont ainsi causé des problèmes aux États-Unis, au Canada, en France, en Belgique, en Suède, en Suisse, et en Australie. En France, il reste toujours 17 Instituts Confucius établis sur le territoire, dont 10 directement infiltrés dans des établissements de l’enseignement supérieur.

Le sénateur André Gattolin (LREM) a ainsi en 2020 appelé les universités françaises à fermer « immédiatement » les Instituts Confucius :

« Il n’est plus possible que les présidents d’université acceptent d’héberger des Instituts Confucius au sein de leur université. Il faut qu’ils prennent conscience de ce qui est en jeu, qu’il ne s’agit pas simplement d’un apprentissage gratuit de la langue, ce n’est pas simplement une approche biculturelle de partage de savoirs et de connaissances, on est dans une stratégie d’influence de plus en plus agressive et je souhaite que l’ensemble des universités françaises se retirent de ce type de coopération. »

Le sénateur Olivier Cadic (UC) est également intervenu pour dénoncer la présence de ces instituts :

« J’ai le même regard là-dessus que le fonctionnement de mosquées d’islamisme radical, c’est la volonté d’imposer un totalitarisme, et je pense que de la même manière on ne doit pas accepter que des centres puissent contester en France des atteintes aux droits de l’Homme et se servent de cela pour promouvoir un totalitarisme ou donner une image du totalitarisme comme étant acceptable ou même enviable. Ce n’est effectivement pas possible, de la même façon qu’en Chine on ne laissera jamais parler librement aux chinois de démocratie, de droits de l’Homme, de valeurs universelles […]. Si on ne peut pas faire cela en Chine, je ne vois pas comment on pourrait autoriser les Instituts Confucius à se développer sur notre territoire. »

Par ailleurs, si la France ne s’est pas encore positionnée à l’échelle nationale, des élus locaux ont déjà adopté une charte de solidarité avec le peuple Ouïghour.

Charte de solidarité avec le peuple Ouïghour, proposée à signature des maires, par Dilnur Reyhan, Présidente de l’Institut Ouïghour d’Europe.

Celle-ci mentionne notamment dans l’article 4 l’arrêt du financement public des Instituts Confucius. Ainsi, en France, cette charte a déjà adoptée par plusieurs villes : Amilly, Bourg en Bresse, Clermont-Ferrand, Cournon-d’Auvergne, Courteuil, Guilherand-Granges, Ivry-sur-Seine, Le Creusot, Lorgues, Marseille, Maxéville, Privas, Reims, Trappes et Valence. Cette charte a également été adoptée par trois villes en Belgique : Charleroi, Liège, et Tournai, en sachant que l’Université de Liège possède également un Institut Confucius représentant une sérieuse menace pour la Belgique.

Pour en revenir au Grand Est, trois Instituts Confucius y sont présents, dans les villes de Metz, Reims et Strasbourg. Un autre point important mis en évidence dans l’article de Jérémy André est une citation de Marie Bizais-Lillig, spécialiste de littérature chinoise (maîtresse de conférence à l’Université de Strasbourg) : « À partir de l’automne 2012, l’université a subi beaucoup de pressions, pas seulement de la Chine, mais aussi de la région, pour l’intégrer en son sein ». Elle a également précisé que « les autorités chinoises font miroiter de nouveaux investissements en Alsace si l’institut est rattaché à l’Université de Strasbourg ». Coïncidence, Christian Mestre, lorsqu’il était directeur de l’UFR de droit dans cette université, voulait que l’Institut Confucius soit rattaché à son UFR. Finalement (et heureusement), cela ne s’est pas produit. L’Institut Confucius s’est quand même établi à l’extérieur.

Pour ce qui est de l’Institut situé à Reims, celui-ci est rattaché à la Néoma Business School. Des étudiant·e·s, parents d’élèves, et associations ont d’ailleurs manifesté le 15 octobre 2020 devant la NEOMA Business School située à Rouen pour réclamer leur fermeture.

À l’Université de Lorraine, la situation est encore pire puisque l’Institut Confucius est directement rattaché à l’université sur le campus de l’Île du Saulcy, à Metz. Il est implanté à la fois dans la Bibliothèque universitaire du Saulcy (BU Saulcy), ainsi qu’au département Langues étrangères appliquées (LEA). Celui-ci est également soutenu par la ville de Metz et la région Grand Est. Cela soulève beaucoup de questions : pourquoi la région Grand Est, tient-elle toujours à financer et collaborer avec ces instituts ? L’hypothèse la plus probable est l’argent. On peut également s’interroger sur les liens qu’entretiennent la ville de Metz et l’Université de Lorraine avec la Chine. Pourquoi le maire de Metz s’est-il rendu en Chine pour négocier avec le Parti Communiste Chinois des contrats pour l’Université de Lorraine ? L’Université de Lorraine perçoit-elle aussi de l’argent de la part de la Chine ? Selon les études, elle pourrait en effet recevoir 100 000$ ou plus de la part du Parti Communiste Chinois.https://cdn.embedly.com/widgets/media.html?type=text%2Fhtml&key=a19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07&schema=twitter&url=https%3A//twitter.com/univ_lorraine/status/1182688482877202434&image=https%3A//i.embed.ly/1/image%3Furl%3Dhttps%253A%252F%252Fabs.twimg.com%252Ferrors%252Flogo46x38.png%26key%3Da19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07

À ce jour, la région Grand Est, la ville de Metz, et l’Université de Lorraine ne se sont toujours pas exprimées sur le sujet. Nous avions sollicité Jean Rottner (président de la région Grand Est), François Grosdidier (maire de Metz, président de Metz Métropole et soutien proche de Jean Rottner), Pierre Mutzenhardt (président de l’Université de Lorraine depuis 2012, date à laquelle l’Institut Confucius s’y est rattaché aussi), ainsi qu’Hélène Boulanger (vice-présidente du conseil d’administration de l’université). De même, les responsables du département LEA, Vasilica Le Floch, Ingrid Lacheny, Adam Wilson, Bénédicte Simard et Virginie De La Cruz ont été sollicités et n’ont pas répondu.

Hannah Arendt disait que dans un régime totalitaire qui commet un génocide, le génocide ne peut pas avoir lieu sans l’adhésion de masse. C’est un comble pour l’Université de Lorraine où un amphithéâtre (dans l’UFR SHS Metz) porte son nom. On s‘est tous un jour demandé comment nous aurions réagi et ce que nous aurions fait sous l’Occupation nazie pendant la Seconde Guerre mondiale ; aurions-nous eu le courage de résister, ou aurions-nous collaboré ? Quoi qu’il en soit, nous ne pourrons jamais répondre à cette question, car c’est le passé. Mais aujourd’hui, nous ne pouvons plus ignorer que ce génocide et ces atroces crimes contre l’humanité se reproduisent. Pendant que la Chine déporte des millions de personnes dans des camps de concentration, nous devons prendre une décision.

Qu’allons-nous faire contre ce génocide et ces crimes contre l’humanité en 2021 ?

PS : La qualification de « génocide » est basée sur l’article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. Celui-ci définit 5 critères, dont un seul suffit, pour qualifier un crime contre l’humanité de génocide. La Chine enfreint de façon systématique les 5 critères. Si vous souhaitez plus d’informations pour comprendre ce qui se passe en Chine, le génocide des Ouïghours et les autres persécutions perpétrées par le régime chinois, restez à l’écoute car un autre article sera prochainement publié et contiendra toutes les informations disponibles.

Sources

(Par ordre chronologique)

SAHLINS, Marshall. Confucius Institutes: Academic Malware. Prickly Paradigm Press, University of Chicago. 2015.

PEDROLETTI, Brice. « Confucius en cheval de Troie ». Le Monde. 27 février 2015. Disponible sur : https://www.lemonde.fr/culture/article/2015/03/12/confucius-en-cheval-de-troie_4592494_3246.html

« Instituts Confucius : Véritables armes de propagande et d’espionnage du régime chinois ». NTD Français. 25 juin 2019. Disponible sur : https://youtu.be/fizhN5AAmHIhttps://cdn.embedly.com/widgets/media.html?src=https%3A%2F%2Fwww.youtube.com%2Fembed%2FfizhN5AAmHI%3Ffeature%3Doembed&display_name=YouTube&url=https%3A%2F%2Fwww.youtube.com%2Fwatch%3Fv%3DfizhN5AAmHI&image=https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FfizhN5AAmHI%2Fhqdefault.jpg&key=a19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07&type=text%2Fhtml&schema=youtube

BALDING, Christopher. « Huawei Technologies’ Links to Chinese State Security Services ». Social Science Research Network. 9 juillet 2019. Disponible sur : https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3415726

SABOURAUD, Valentine. « Université — Quand la Chine surveille les facs australiennes ». Libération. 2 août 2019. Disponible sur : https://www.liberation.fr/planete/2019/08/02/quand-la-chine-surveille-les-facs-australiennes_1743352/

CAVE, Danielle, LEIBOLD, James, MUNRO, Kelsey, RUSER, Nathan, XIUZHONG XU, Vicky. « Uyghurs for sale. ‘Re-education’, forced labour and surveillance beyond Xinjiang ». Australian Strategic Policy Institute. 1er mars 2020. Disponible sur : https://www.aspi.org.au/report/uyghurs-sale

« Comment la Chine infiltre les systèmes scolaires ». 7 jours sur Terre. 11 mai 2020. Disponible sur : https://youtu.be/juo9Cx8T95shttps://cdn.embedly.com/widgets/media.html?src=https%3A%2F%2Fwww.youtube.com%2Fembed%2Fjuo9Cx8T95s%3Ffeature%3Doembed&display_name=YouTube&url=https%3A%2F%2Fwww.youtube.com%2Fwatch%3Fv%3Djuo9Cx8T95s&image=https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2Fjuo9Cx8T95s%2Fhqdefault.jpg&key=a19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07&type=text%2Fhtml&schema=youtube

« La chanteuse Zara Larsson met fin à sa collaboration avec Huawei ». BFMTV. 4 août 2020. Disponible sur : https://www.bfmtv.com/people/musique/la-chanteuse-zara-larsson-met-fin-a-sa-collaboration-avec-huawei_AD-202008040114.html

MALOVIC, Dorian. « Les Instituts Confucius dans l’œil du cyclone américain ». La Croix. 14 août 2020. Disponible sur : https://www.la-croix.com/Monde/Instituts-Confucius-loeil-cyclone-americain-2020-08-14-1201109201

« Institut Confucius: l’influence de Pékin en France et dans le monde ». NTD Français. 26 octobre 2020. Disponible sur : https://youtu.be/ssKa_ejWhPYhttps://cdn.embedly.com/widgets/media.html?src=https%3A%2F%2Fwww.youtube.com%2Fembed%2FssKa_ejWhPY%3Ffeature%3Doembed&display_name=YouTube&url=https%3A%2F%2Fwww.youtube.com%2Fwatch%3Fv%3DssKa_ejWhPY&image=https%3A%2F%2Fi.ytimg.com%2Fvi%2FssKa_ejWhPY%2Fhqdefault.jpg&key=a19fcc184b9711e1b4764040d3dc5c07&type=text%2Fhtml&schema=youtube

« Huawei / Megvii Uyghur Alarms ». IPVM. 8 décembre 2020. Disponible sur : https://ipvm.com/reports/huawei-megvii-uygur

DOU, Eva, HARWELL, Drew. « Huawei tested AI software that could recognize Uighur minorities and alert police, report says ». The Washington Post. 8 décembre 2020. Disponible sur : https://www.washingtonpost.com/technology/2020/12/08/huawei-tested-ai-software-that-could-recognize-uighur-minorities-alert-police-report-says/

MAQUET, Clémence. « Huawei, partenaire technologique de l’oppression des populations Ouïghours ? ». Siècle Digital. 11 décembre 2020. Disponible sur : https://siecledigital.fr/2020/12/11/huawei-partenaire-technologique-de-loppression-des-populations-ouighours/

JOUATHEL, Corentin. « Ouïghours : comme Huawei, Alibaba se retrouve dans la tourmente ». Konbini. 21 décembre 2020. Disponible sur : https://techno.konbini.com/fr/actualite/ouighours-comme-huawei-alibaba-se-retrouve-dans-la-tourmente

ANDRÉ, Jérémy. « Comment la Chine pousse ses pions à l’université ». Le Point. 25 février 2021. Disponible sur : https://journal.lepoint.fr/comment-la-chine-pousse-ses-pions-a-l-universite-2415125

ANDRÉ, Jérémy. « Comment la Chine pousse ses pions à l’université ». Le Point. 26 février 2021. Disponible sur : https://www.lepoint.fr/monde/comment-la-chine-pousse-ses-pions-a-l-universite-26-02-2021-2415542_24.php

« “Complément d’enquête”. Chine, la grande offensive ». France Télévisions. 27 février 2021. Disponible sur : https://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/complement-d-enquete/complement-d-enquete-du-jeudi-25-fevrier-2021_4284643.html

KREMPP, Guillaume. « Raphaël Glucksmann : “Les citoyens veulent-ils financer [Huawei] une entreprise qui massacre des Ouïghours ?” ». Rue89 Strasbourg. 27 février 2021. Disponible sur : https://www.rue89strasbourg.com/raphael-glucksmann-huawei-citoyens-massacre-ouighours-201534

DE ROYER, Solenn, GUIBERT, Nathalie. « L’intense lobbying du géant chinois Huawei auprès des décideurs politiques français ». Le Monde. 3 mars 2021. Disponible sur : https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/03/03/entrisme-ou-relations-tout-a-fait-normales-enquete-sur-la-french-connection-de-huawei-a-paris_6071760_3234.html

GUINAMARD, Julia. « Le Monde dévoile les pratiques de lobbying de Huawei ». Siècle Digital. 4 mars 2021. Disponible sur : https://siecledigital.fr/2021/03/04/le-monde-lobbying-huawei-france/

CHAPPE, Louise. « Manifestation contre l’implantation de l’entreprise Huawei à Brumath et les Instituts Confucius jeudi ». Rue89 Strasbourg. 16 mars 2021. Disponible sur : https://www.rue89strasbourg.com/manifestation-contre-limplantation-de-lentreprise-huawei-a-brumath-et-les-instituts-confucius-jeudi-202772

« Strasbourg: 150 personnes manifestent contre l’implantation de Huawei en Alsace ». Le Figaro avec AFP. 18 mars 2021. Disponible sur : https://www.lefigaro.fr/flash-eco/strasbourg-150-personnes-manifestent-contre-l-implantation-de-huawei-en-alsace-20210318

GÉRARD, Jean-François. « La Région Grand Est interpellée par des manifestants chinois sur l’arrivée de Huawei ». Rue89 Strasbourg. 19 mars 2021. Disponible sur : https://www.rue89strasbourg.com/region-grand-est-interpellee-manifestants-chinois-arrivee-huawei-202945

POUILLE, Jordan. « Surveillance des Ouïgours : quand des étudiants de grandes écoles éloignent Huawei de leur Master ». La Vie. 24 mars 2021. Disponible sur : https://www.lavie.fr/actualite/surveillance-des-ouigours-quand-des-etudiants-de-grandes-ecoles-eloignent-huawei-de-leur-master-72248.php

STROOBANTS, Jean-Pierre. « Huawei accusé d’espionnage aux Pays-Bas ». Le Monde. 18 avril 2021. Disponible sur : https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/04/18/telecommunications-le-geant-chinois-huawei-accuse-d-espionnage-aux-pays-bas_6077208_3234.html

KESZEI, Nicolas. « Alibaba a-t-il fait entrer des agents du renseignement chinois à l’aéroport de Liège ? ». L’Écho. 6 mai 2021. Disponible sur : https://www.lecho.be/economie-politique/belgique/general/alibaba-a-t-il-fait-entrer-des-agents-du-renseignement-chinois-a-l-aeroport-de-liege/10304069.html

Remerciements

Un grand merci à l’Institut Ouïghour d’Europe (IODE), au député Raphaël Glucksmann et à tous les élus qui comme lui s’engageront pour la cause ouïghoure, ainsi qu’à tous les groupes locaux et citoyen·ne·s, qui se mobilisent partout en France pour dénoncer le plus grand internement de masse du 21ème siècle

Source: https://medium.com/@anthony.anstett/jean-rottner-pr%C3%A9sident-de-la-r%C3%A9gion-grand-est-complice-du-g%C3%A9nocide-des-ou%C3%AFghours-bcbd0434ab36

Surprenante coïncidence et profonde matière à réflexion, quelques jours seulement après le cuisant revers stratégique subi par la France dans la zone indo-pacifique, l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire (IRSEM), think-tank du ministère des Armées, a publié le rapport d’analyse le plus fouillé, le plus exhaustif à ce jour sur la stratégie d’influence internationale du régime chinois.

Dans Les opérations d’influence chinoise – un moment machiavélien (disponible ici et ici), les chercheurs de l’Institut confirment à grand renfort d’exemples et sur près de 650 pages ce que les lecteurs attentifs d’Epoch Times savent depuis longtemps : le régime communiste chinois s’est massivement infiltré en France comme dans la plupart des pays occidentaux, dans un effort organisé pour imposer son modèle et sa domination.

Valérie Niquet, politologue à la Fondation pour la Recherche Stratégique, voit dans la publication de ce rapport qu’auréole la légitimité du ministère des Armées, « un signe du fait que la France a compris que la Chine est une menace multiforme ». Sur TV5 Monde, elle rappelle que ce sujet, trop peu présenté au public, est bien connu de tous les politologues : « C’est dans l’ADN du régime chinois et des régimes léninistes : la propagande, la manipulation, la guerre de l’information. »

Dans leur rapport, Paul Charon et Jean-Baptiste Jeangène Vilmer rappellent d’abord que « ce qui est en cause n’est ni une population ni un pays mais bien les pratiques d’un pouvoir autoritaire. On peut critiquer l’un sans dénigrer l’autre. En confondant les deux, le régime s’approprie d’ailleurs la voix du « peuple chinois » qui, en Chine comme à l’étranger quoique par des voies différentes, est souvent le premier à critiquer les pratiques du PCC ». Puis, ils pointent le fait douloureux que « les services de renseignement d’un certain nombre de pays occidentaux ont alerté sur l’ambition hégémonique et révisionniste du PCC [Parti communiste chinois]. Ils n’ont pas été pris au sérieux par la plupart des décideurs, victimes à la fois d’une forme de naïveté face à la thèse chinoise de « l’émergence pacifique », et d’un excès de confiance quant à la supériorité morale du modèle démocratique. »

Une liste effrayante s’égrène ensuite, faite d’exemples de manipulations, de coercitions, de tentatives d’assassinat hors de Chine. Ce qu’il y a de pire sans doute est d’y voir, d’un côté les victimes, la violence des efforts du régime chinois pour empêcher que les camps de concentration et les trafics d’organes qu’il coordonne soient reconnus ; et de l’autre une corruption rampante : des sourires satisfaits dans les salons chics, l’argent qui coule à flots pour acheter hommes politiques, intellectuels, sportifs, youtubeurs.https://cf87d281d4aa4c3b32a7dd28d495f1dd.safeframe.googlesyndication.com/safeframe/1-0-38/html/container.html

Du premier côté, on voit le régime menacer les diasporas hors de Chine, mobiliser des millions (vous lisez bien, millions) d’internautes payés pour diffuser sa propagande sur les réseaux sociaux et faire croire à l’existence d’une opinion en sa faveur. On le voit tenter de discréditer ceux qu’il persécute, avec un rôle majeur « des diplomates chinois dans la surveillance, l’infiltration et le harcèlement d’un certain nombre de groupes considérés comme dissidents, dont en particulier les adeptes du Falun Gong ». Qu’il s’agisse des pratiquants de Falun Gong, des Ouïghours ou des Tibétains, l’ampleur est telle qu’il s’agit de « la plus grande campagne de répression transnationale dans le monde », indiquent les auteurs.

De l’autre, on subit la description de son infiltration en France via l’IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques), ainsi qu’avec la France-China Foundation qui permet « la constitution d’une armée de réserve dans laquelle le Parti peut puiser pour mener ses opérations d’influence ». La Fondation Prospective et Innovation, présidée par l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, n’est pas en reste puisqu’on comprend qu’elle n’est qu’un relais de propagande pour le régime. Pour les auteurs, « le dispositif chinois rappelle en l’espèce la façon dont les Soviétiques utilisaient l’envoi de délégations à l’étranger pour offrir au KGB des voies de pénétration des sociétés visées et pour faciliter le travail de ciblage de potentiels ‘idiots utiles’ ».

Le but ultime du Parti communiste, indiquent les auteurs en citant un idéologue du parti, « est de manipuler les valeurs, l’esprit/l’éthos national, les idéologies, les traditions culturelles, les croyances historiques, etc., d’un pays pour les inciter à abandonner leur compréhension théorique, leur système social et leur voie de développement et d’atteindre des objectifs stratégiques sans victoire ».

Ce terrible pavé serait, à vrai dire, plus un rapport d’autopsie qu’un rapport d’analyse stratégique si les auteurs ne concluaient en montrant combien le Parti communiste se discrédite lui-même et, à l’inverse de ses plans et malgré ses efforts, finit par unir le monde libre contre lui. La publication même de ce rapport d’un think tank gouvernemental pourrait être le signe du début d’un réveil de la République française, qu’il va falloir désormais stimuler. Comme à l’hôpital où les phases de réveil sont longues et incertaines, il faudra garder l’œil sur l’électrocardiogramme français et lui rappeler régulièrement les objectifs du régime chinois : « L’influence vers l’extérieur a d’abord et avant tout des motivations intérieures : la priorité absolue du PCC est de rester au pouvoir. Tout le reste en découle et doit s’interpréter en fonction. »Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide de l’État et n’appartenant à aucun groupe politique ou financier. Depuis le jour de notre création, nous faisons face à des attaques systématiques pour faire taire la vérité, notamment de la part du parti communiste chinois. C’est pourquoi nous comptons sur votre générosité pour défendre un journalisme indépendant, honnête et en bonne santé. Ensemble, nous pouvons continuer à faire connaître la vérité.

C’est sans doute une première mondiale. Une étude sans précédent de 650 pages, publiée par l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire du ministère des Armées, dévoile le réseau tentaculaire d’influences du Parti communiste chinois à travers le monde. On y apprend que Pékin mène un large éventail d’opérations de propagande, de manipulation, d’intimidation et de désinformation à grande échelle pour imposer son modèle à la planète.

L’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire (Irsem) a rendu public le 20 septembre un rapport intitulé « Les opérations d’influence chinoises : un moment machiavélien ». Une synthèse minutieuse de plus de 650 pages publiée au terme de deux années de recherches par le directeur de l’Irsem, Jean-Baptiste Jeangène-Vilmer et son directeur du domaine « Renseignement, anticipation et menaces hybrides », Paul Charon.

Le rapport offre un panorama relativement complet de l’influence chinoise dans le monde et montre que le Parti communiste chinois (PCC) est entré « dans un moment machiavélien », estimant plus sûr d’être craint que d’être aimé, expliquent les auteurs.

L’objectif de ces opérations d’influence chinoises dans le monde est d’une part d’empêcher tout discours négatif sur le PCC, notamment concernant les « cinq poisons » (Ouïghours, Tibétains, Falun Gong, « militants pro-démocratie » et « indépendantistes taïwanais ») et d’autre part, de produire un discours positif sur la « prospérité, la puissance et l’émergence pacifique » de la Chine.

Les opérations d’influence du régime chinois

Les actions d’infiltration du PCC à l’étranger relèvent de deux objectifs principaux : 1. Séduire les publics étrangers, en faisant une narration positive de la Chine et 2. Infiltrer et contraindre. L’un comme l’autre passent par une « nébuleuse d’intermédiaires » décrits dans le rapport : les diasporas, les médias, la diplomatie, l’économie, la politique, l’éducation, les think tank, la culture et la manipulation de l’information (notamment au sujet du Covid).

On peut lire dans le rapport que « les acteurs principaux mettant en œuvre les opérations d’influence chinoises sont des émanations du Parti, de l’État, de l’Armée comme des entreprises. Au sein du Parti, il s’agit en particulier du département de Propagande, en charge de l’idéologie, qui contrôle tout le spectre des médias et toute la production culturelle du pays ; du département du Travail de Front uni, qui comporte douze bureaux, reflétant ses principales cibles ; du département des Liaisons internationales, qui entretient des relations avec les partis politiques étrangers ; du Bureau 610, qui a des agents dans le monde entier agissant en dehors de tout cadre légal pour éradiquer le mouvement Falun Gong ».

Le quartier général des opérations d’influence chinoises est la base 311 de l’Armée populaire, basée à Fuzhou dans le sud du pays. La base possède neuf unités qui mènent leurs opérations d’influence via des stations de radio, des maisons d’édition, des universités et son « armée des 50 centimes ».

Deux millions de citoyens chinois seraient payés à temps plein pour relayer la propagande de Pékin et 20 millions agiraient à temps partiel pour inonder les réseaux sociaux de la propagande du PCC en suivant trois types d’affrontement : 1. Façonner et imposer un récit servant les intérêts du pays (la guerre de opinion publique), 2. Dissuader, voire terroriser les forces ennemies (la guerre psychologique) et 3. Utiliser la justice comme « arme de guerre » (la guerre du droit) pour attaquer ou sanctionner les individus ou les États considérés comme hostiles.

Le réseau d’influence chinois en France

La France, comme bien d’autres pays, n’échappe pas au gigantesque réseau d’influence du PCC et accueille de nombreux relais de la propagande de Pékin.

« Ce rapport est excellent puisqu’il extrêmement complet et fouillé. C’est la première fois en France qu’il y a cette capacité, de façon systématique, à démonter les efforts et les stratégies d’influence chinoise », a commenté Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste de la Chine, sur France Info.

Plusieurs voix portent le discours du régime chinois en France. Sont pointés du doigt la maison d’édition « La Route de la Soie » et sa revue Dialogue Chine France (éditée par un organisme lié au Parti communiste chinois), le think tank « The Bridge Tank » (qui organise des événements financés par l’ambassade de Chine), la fondation « Prospective et Innovation » présidée par Jean-Pierre Raffarin et le think tank IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques).

L’IRIS a réagi à la publication de ce rapport, appréciant peu d’être cité comme relais de la propagande du régime chinois. Le directeur de l’Irsem a répondu en citant les éléments abordés dans le rapport :

Le rapport donne l’exemple de la Fondation Prospective et Innovation présidée par l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Selon l’Irsem, « au cours de la dernière décennie, la Chine est clairement devenue le sujet phare de la fondation » et son « contenu participe à répandre les arguments et les éléments de langage du Parti communiste. »

L’emprise chinoise passerait également par les Instituts Confucius subventionnés par l’État français. Au nombre de 18 en France, ces écoles chinoises « permettent à Pékin de renforcer son influence dans les villes moyennes », décrit l’Irsem. Selon le rapport, les acteurs politiques locaux sont pleinement conscients des liens étroits entre les Instituts et le gouvernement chinois, mais espèrent justement pouvoir s’en servir comme des « canaux pour développer les relations commerciales ». Certains chercheurs et intellectuels sont aussi cités pour leur rôle de porte-étendard du PCC en France.

Le Falun Gong cité 79 fois dans le rapport

Le rapport de l’Irsem consacre un chapitre à la création du Bureau 610, une structure qui a « des agents dans le monde entier agissant en dehors de tout cadre légal pour éradiquer le mouvement Falun Gong ».

Le Falun Gong, également connu sous le nom de Falun Dafa, est une ancienne pratique spirituelle chinoise consistant en des exercices de méditation lents et des enseignements moraux qui encouragent l’authenticité, la bienveillance et la tolérance dans la vie quotidienne. Sa popularité a atteint son apogée à la fin des années 1990 en Chine, avec 70 à 100 millions de pratiquants, selon les estimations officielles.

Le Bureau 610 est une commission de haut niveau secrète qui a joué un rôle clé dans les campagnes de persécution du Parti communiste chinois. Souvent comparé à la « Gestapo chinoise », il a été créé par l’ancien dirigeant du Parti Jiang Zemin le 10 juin 1999 (d’où son appellation) dans le but de mettre en application l’éradication du Falun Gong en dehors de tout cadre légal.

En Occident, les émanations du Bureau 610, qui s’appuient sur les diasporas chinoises et les universitaires, médias ou personnalités publiques, susceptibles de soutenir l’action du PCC, sont également incités à prendre publiquement position contre le Falun Gong.

Les prélèvements d’organes forcés et le trafic d’organes

L’ensemble des actions menées à l’encontre des Ouïghours par le régime communiste chinois est l’un des exemples de guerre psychologique coercitive décrit dans le rapport, et dont sont aussi victimes les pratiquants de Falun Gong depuis 1999.

« Arrestations aléatoires, internement de masse, travail forcé, traçage numérique, contrôles fréquents, sinisation forcée, ‘rééducation’ des enfants, destruction de lieux de culte, harcèlement, sédentarisation »… les Ouïghours font l’objet d’une répression violente au nom de la « lutte contre l’extrémisme religieux » du PCC. Selon le rapport du ministère des Armées, on estime qu’1 à 3 millions de Ouïghours sont aujourd’hui internés dans les camps. « Les femmes subissent une stérilisation forcée, et autres « mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe » qui font partie des actes constituant un crime de génocide. »

Les prisonniers seraient également victimes de prélèvement d’organes servant à alimenter un vaste trafic d’organes « halal » à destination des pays du Golfe. Les pratiquants de Falun Gong sont également victimes depuis 1999 de ces prélèvements forcés pour alimenter un vaste réseau de transplantation international. Le PCC « supervise la plus vaste entreprise étatique de trafic d’organes dans le monde : il est à peu près certain qu’un grand nombre d’organes sont extraits de prisonniers d’opinion [qui sont] exécutés à la demande pour des clients payants », peut-on lire dans le rapport.

Ces actes innommables ne suscitent quasiment aucune réaction internationale. La Chine a même contribué à créer la task force de l’OMS contre le trafic d’organes et à placer un représentant à la tête de la Transplantation Society (TTS). Selon l’Irsem, c’est parce que le régime chinois réussit à contrôler et à façonner le discours sur ce sujet, avec trois objectifs selon Matthew Robertson : « protéger la sécurité politique et la légitimité du régime de l’accusation selon laquelle il exploite systématiquement les prisonniers d’opinion comme source d’organes ; garantir la disponibilité continue d’organes de transplantation pour les membres de l’élite du parti ; renforcer l’image de la Chine sur la scène mondiale en tant que chef de file dans un domaine avancé de la médecine, tout en préservant le prestige et l’accès des chirurgiens chinois aux revues médicales occidentales, aux conférences et aux sociétés professionnelles ».

***

Les auteurs du rapport, Paul Charon et Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, soulignent que les stratégies et les opérations d’influence décrites dans le rapport sont celles du régime chinois, et non de la Chine ou du peuple chinois : « Le problème n’est pas « la Chine », elle n’est pas un « ennemi » (c’est au contraire le Parti qui divise le monde en « amis » – ceux qui défendent ses intérêts – et « ennemis » – ceux qui osent le critiquer), […] le problème n’est pas un différend philosophique entre deux options également valables, une Chine prétendument « confucianiste » et l’ordre international « libéral ». Le problème, comme le résume l’historien Frank Dikötter, est que « le PCC reste, structurellement, un parti unique léniniste [qui] cherche à saper toute opposition tant au pays qu’à l’étranger » ».

Selon les auteurs, cette stratégie chinoise tentaculaire est souvent inefficace voire contreproductive : « Le choix de la Chine ces dernières années est celui de l’agressivité, être craint plutôt que séduire. La conséquence en est une dégradation durable de son image à l’étranger. Mais son objectif prioritaire est ailleurs : maîtriser la situation à l’intérieur du pays. »

Malgré les efforts considérables déployés par Pékin pour imposer son propre modèle autoritaire au monde libre, « le meilleur ennemi de la Chine en matière d’influence », c’est elle-même, estime un groupe de réflexion rattaché au gouvernement français.

Ces conclusions sont tirées d’un rapport français de près de 650 pages intitulé « Les Opérations d’influence chinoises » publié par l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire (IRSEM), un organisme indépendant affilié au ministère des Armées.

Selon le rapport publié cette semaine, Pékin s’isole sur le plan mondial après avoir pris un virage agressif sur le front diplomatique ces dernières années. Un comportement qui suscite un retour de bâton de la part de la communauté internationale, même de la part de pays traditionnellement en bons termes avec le régime chinois.

Selon le rapport, les relations de la Chine avec l’Occident se sont nettement détériorées depuis 2017.

Un exemple notable est celui de la Suède, le premier pays occidental à établir des relations diplomatiques avec le Parti Communiste Chinois (PCC) à l’époque où celui-ci prend le contrôle de la Chine.

Jusque-là Pékin bénéficiait d’une opinion publique relativement favorable en Suède, mais un virage a été amorcé avec la nomination en 2017 d’un nouvel ambassadeur chinois, Gui Congyou, explique le rapport.

Les provocations de Gui Congyou – menacer les responsables suédois pour qu’ils n’assistent pas à une cérémonie destinée à récompenser un dissident chinois emprisonné, intimider les médias locaux qui produisent des reportages critiques sur la Chine, faire pression sur un hôtel à Stockholm pour qu’il annule une célébration de la fête nationale taïwanaise – ont été « désastreuses ». Le ministère suédois des Affaires étrangères a convoqué M. Gui une quarantaine de fois depuis son arrivée en 2017. Les parlementaires du pays ont demandé son expulsion à deux reprises. La cote de la Chine auprès du public a également chuté, 80 % des Suédois ont désormais une opinion négative de la Chine, contre moins de la moitié il y a quatre ans.

Des manifestants brandissent des pancartes et des banderoles lors d’une manifestation à Sydney pour demander au gouvernement australien de boycotter les Jeux olympiques d’hiver de 2022 à Pékin en raison du non-respect des droits de l’homme par la Chine, le 23 juin 2021. (Saeed Khan/AFP via Getty Images)

L’Australie, qui exporte près d’un tiers de ses recettes vers la Chine, a également changé de position vis-à-vis du régime.

Les sanctions commerciales de rétorsion imposées par Pékin à Canberra, pour avoir demandé une enquête indépendante sur l’origine du virus, l’année dernière, n’ont fait que susciter une résistance accrue à l’influence chinoise, y compris dans le milieu universitaire. Pendant ce temps, l’Australie a adopté une loi en décembre 2020 destinée à imposer davantage d’obstacles aux entreprises en relation avec la Chine désireuses d’acquérir des actifs australiens.

Des dérives similaires ont eu lieu ailleurs : L’Afrique devient toujours plus exaspérée face à l’Initiative ceinture et route (ICR), l’énorme projet chinois, destinée à essaimé des infrastructures sur l’ensemble du globe. Selon elle, la Chine provoque l’épuisement des ressources naturelles, la pollution des terres et exploite les travailleurs.

Un ouvrier chinois porte du matériel pour la première ligne ferroviaire reliant la Chine au Laos, un élément clé de l’Initiative ceinture et route lancée par Pékin à travers le Mékong, à Luang Prabang, au Laos, le 8 février 2020. (Aidan Jones/AFP via Getty Images)

Le Canada a dénoncé la détention arbitraire de ses citoyens par Pékin à la suite de l’arrestation de Meng Wanzhou, un cadre de Huawei, une mesure que les observateurs ont qualifiée de « diplomatie de l’otage ». L’étouffement des libertés à Hong Kong par le régime a suscité la colère du Royaume-Uni, et ses graves violations des droits de l’homme dans le Xinjiang ont plongé l’image de Pékin au plus bas auprès des démocraties occidentales.

Le rapport note qu’en février, six États d’Europe centrale et orientale qui ont participé au sommet « 17+1 » avec la Chine, longtemps retardé, ont choisi d’envoyer un représentant subalterne et non leur chef d’État attitré, ce qui témoigne d’une « perte d’appétence » dans l’engagement avec Pékin, probablement liée à l’image ternie du régime, selon le rapport. Le groupe 17+1, « censé être une porte vers l’Europe pour Pékin », est désormais un « mécanisme zombie » et la Lituanie a montré l’exemple en se retirant.

Les auteurs espèrent que le rapport enverra un coup de semonce aux dirigeants de Pékin quant aux conséquences de leurs actions.

Le « comportement contre-productif » adopté par Pékin ces dernières années discrédite toujours davantage le gouvernement chinois : « Son problème d’impopularité prend en effet des proportions telles qu’il pourrait indirectement affaiblir le Parti, y compris vis-à-vis de sa propre population. »

Eva Fu est  journaliste  à New York travaillant pour Epoch Times, spécialiste des relations entre les États-Unis et la Chine, la liberté religieuse et les droits de l’homme.

Regarder en ligne: https://drive.google.com/file/d/1qxUvLrLG4SSg8ANZnqvBfDOxUrtPmaB5/edit

Pendant longtemps, on a pu dire que la Chine, contrairement à la Russie, cherchait davantage à être aimée que crainte ; qu’elle voulait séduire, projeter une image positive d’elle-même dans le monde, susciter l’admiration. Pékin n’a pas renoncé à séduire, à son attractivité et à son ambition de façonner les normes internationales, et il reste essentiel pour le Parti communiste de ne pas « perdre la face ». Mais, en même temps, Pékin assume de plus en plus d’infiltrer et de contraindre : ses opérations d’influence se sont considérablement durcies ces dernières années et ses méthodes ressemblent de plus en plus à celles employées par Moscou. C’est un « moment machiavélien » au sens où le Parti-État semble désormais estimer que, comme l’écrivait Machiavel dans Le Prince, « il est plus sûr d’être craint que d’être aimé ». Ce qui correspond à une « russianisation » des opérations d’influence chinoises.

Ce rapport s’intéresse à cette évolution, avec l’ambition de couvrir tout le spectre de l’influence, de la plus bénigne (diplomatie publique) à la plus maligne, c’est-à-dire l’ingérence (activités clandestines). Pour ce faire, il procède en quatre parties, présentant successivement les principaux concepts ; les acteurs mettant en œuvre ces opérations, notamment la base 311 de l’Armée populaire de libération ; les actions conduites par Pékin à l’égard des diasporas, des médias, de la diplomatie, de l’économie, de la politique, de l’éducation, des think tanks et en termes de manipulations de l’information, entre autres leviers ; et enfin quelques études de cas (Taïwan, Singapour, Suède, Canada, et les opérations ayant visé les manifestants hongkongais en 2019 ou cherché à faire croire à l’origine américaine de la Covid-19 en 2020). La conclusion revient sur cette « russianisation », qui a trois composantes : Pékin s’inspire de Moscou dans plusieurs registres, il subsiste évidemment des différences entre les deux, et il existe aussi un certain degré de coopération. Pour finir, le rapport évalue l’efficacité de cette nouvelle posture chinoise qui peut s’enorgueillir de certains succès tactiques, mais constitue un échec stratégique.


 Résumé 

     Pendant longtemps, on a pu dire que la Chine, contrairement à la Russie, cherchait davantage à être aimée que crainte ; qu’elle voulait séduire, projeter une image positive d’elle-même dans le monde, susciter l’admiration. Pékin n’a pas renoncé à séduire, à son attractivité ni à son ambition de façonner les normes internationales, et il reste très important pour le PCC de ne pas « perdre la face ». Mais, en même temps, Pékin assume de plus en plus d’infiltrer et de contraindre : ses opérations d’influence se sont considérablement durcies ces dernières années et ses méthodes ressemblent de plus en plus à celles employées par Moscou. C’est un « moment machiavélien » au sens où Pékin semble désormais estimer que, comme l’écrivait Machiavel dans Le Prince, « il est plus sûr d’être craint que d’être aimé ». Ce qui correspond donc à une « russianisation » des opérations d’influence chinoises. Ce rapport s’intéresse à cette évolution, avec l’ambition de couvrir tout le spectre de l’influence, de la plus bénigne (diplomatie publique) à la plus maligne, c’est-à-dire l’ingérence (activités clandestines). Pour ce faire, il procède en quatre parties, présentant successivement les concepts, les acteurs, les actions et quelques cas.

1. Les concepts importants pour comprendre les opérations d’influence chinoises sont notamment ceux de « Front uni » – une politique du PCC qui consiste à éliminer ses ennemis intérieurs comme extérieurs, contrôler les groupes qui peuvent défier son autorité, construire une coalition autour du Parti pour servir ses intérêts, et projeter son influence jusqu’à l’étranger – et des « Trois guerres », qui représentent l’essentiel de la « guerre politique » chinoise, une forme de conflictualité non cinétique visant à vaincre sans combattre, en façonnant un environnement favorable à la Chine. Entreprise en temps de guerre comme en temps de paix, elle est composée de la guerre de l’opinion publique, la guerre psychologique et la guerre du droit (qui s’apparente, sans correspondre complètement, à ce que l’on appelle en anglais le lawfare).

Un autre concept, d’importation soviétique, est également utile pour décrire le répertoire utilisé par Pékin : celui de « mesures actives », dont font notamment partie la désinformation, les contrefaçons, le sabotage, les opérations de discrédit, la déstabilisation de gouvernements étrangers, les provocations, les opérations sous fausse bannière et les manipulations destinées à fragiliser la cohésion sociale, le recrutement d’« idiots utiles » et la création de structures de façade (organisations de front).

2. Les acteurs principaux mettant en œuvre les opérations d’influence chinoises sont des émanations du Parti, de l’État, de l’Armée comme des entreprises. Au sein du Parti, il s’agit en particulier du département de Propagande, en charge de l’idéologie, qui contrôle tout le spectre des médias et toute la production culturelle du pays ; du département du Travail de Front uni (DTFU), qui comporte douze bureaux, reflétant ses principales cibles ; du département des Liaisons internationales (DLI), qui entretient des relations avec les partis politiques étrangers ; du Bureau 610, qui a des agents dans le monde entier agissant en dehors de tout cadre légal pour éradiquer le mouvement Falun Gong ; il faut inclure dans ce groupe la Ligue de la jeunesse communiste (LJC), tout à la fois courroie de transmission vers la jeunesse, pépinière pour de futurs cadres du Parti et force mobilisable en cas de besoin, même si elle n’est pas formellement une structure du Parti mais une organisation de masse.

Au sein de l’État, deux structures en particulier sont impliquées dans les opérations d’influence : le ministère de la Sécurité d’État (MSE), qui est la principale agence civile de renseignement, et le bureau des Affaires taïwanaises (BAT), qui a la charge de la propagande à destination de Taïwan.

Au sein de l’Armée populaire de libération (APL), c’est la Force de soutien stratégique (FSS), et notamment le département des Systèmes de réseaux, qui dispose des capacités et missions dans le domaine informationnel. Plus précisément, le principal acteur identifié dans ce domaine est la base 311, qui a son quartier général dans la ville de Fuzhou, et qui est dédiée à l’application de la stratégie des « Trois guerres ». Elle gère aussi des entreprises de médias qui servent de couvertures civiles et un faux hôtel qui est en réalité un centre de formation.

Enfin, les entreprises publiques comme privées jouent un rôle important dans la collecte des données dont l’efficacité des opérations d’influence dépend puisqu’il faut savoir qui influencer, quand et comment. Peuvent en particulier servir à la collecte des données les infrastructures, notamment les bâtiments et les câbles sous-marins ; ainsi que les nouvelles technologies, dont les plateformes numériques WeChat, Weibo et TikTok, des entreprises comme Beidou et Huawei, et des bases de données offrant un aperçu de ce que des chercheurs appellent le « techno-autoritarisme », ou « autoritarisme numérique » chinois, et qui sont utilisées pour alimenter et préparer des opérations d’influence à l’étranger. Il faudrait ajouter le département d’état-major interarmes qui semble avoir hérité des missions de renseignement humain de l’ancien 2APL. Faute de sources celui-ci n’est toutefois pas abordé dans le présent rapport.

3. Les actions mises en œuvre par Pékin dans ses opérations d’influence à l’étranger relèvent de deux objectifs principaux et non exclusifs l’un de l’autre : d’une part, séduire et subjuguer les publics étrangers, en faisant une narration positive de la Chine, dont témoignent notamment quatre récits (le « modèle » chinois, la tradition, la bienveillance et la puissance) ; d’autre part et surtout, infiltrer et contraindre. L’infiltration vise à pénétrer lentement les sociétés adverses afin d’entraver toute velléité d’action contraire aux intérêts du Parti. La contrainte correspond à l’élargissement progressif de la diplomatie « punitive » ou « coercitive » pour devenir une politique de sanction systématique contre tout État, organisation, entreprise ou individu menaçant les intérêts du Parti. L’une comme l’autre passent généralement par une nébuleuse d’intermédiaires. Ces pratiques visent en particulier les catégories suivantes :

– les diasporas, avec le double objectif de les contrôler pour qu’elles ne représentent pas de menace pour le pouvoir (Pékin mène une campagne de répression transnationale qui, selon l’ONG Freedom House, est « la plus sophistiquée, globale et complète dans le monde ») et de les mobiliser pour servir ses intérêts.

– les médias, l’objectif explicite de Pékin étant d’établir « un nouvel ordre mondial des médias ». Pour ce faire, le pouvoir a investi 1,3 milliard d’euros par an depuis 2008 pour mieux contrôler son image dans le monde. Les grands médias chinois ont une présence mondiale, dans plusieurs langues, sur plusieurs continents, et sur tous les réseaux sociaux, y compris ceux bloqués en Chine (Twitter, Facebook, YouTube, Instagram), et ils investissent beaucoup d’argent pour amplifier artificiellement leur audience en ligne. Pékin cherche aussi à contrôler les médias sinophones à l’étranger, avec succès puisque le PCC a de fait une situation de quasi-monopole, et les médias mainstream. Enfin, le Parti-État s’intéresse aussi au contrôle du contenant, influençant chaque étape de la chaîne d’approvisionnement mondiale de l’information, avec la télévision, les plateformes numériques et les smartphones.

– la diplomatie, et notamment deux éléments. D’une part, l’influence sur les organisations et les normes internationales : Pékin déploie non seulement des efforts diplomatiques classiques mais aussi des opérations d’influence clandestines (pressions économiques et politiques, cooptation, coercition et corruption) afin de renforcer son influence. D’autre part, la diplomatie dite du « loup guerrier » désigne les postures du porte-parolat du ministère des Affaires étrangères et d’une dizaine de diplomates qui font preuve d’une agressivité croissante. Les attaques adoptent des formes classiques mais aussi relativement nouvelles, reposant notamment sur une utilisation des réseaux sociaux et un recours décomplexé à l’invective, l’admonestation voire l’intimidation. Globalement, ce tournant agressif de la diplomatie chinoise est contre-productif et a largement contribué à la dégradation brutale de l’image de la Chine dans le monde ces dernières années, mais l’évolution est sans doute durable parce que l’objectif de cette stratégie est moins de conquérir les cœurs et les esprits que de plaire à Pékin.

– l’économie, la dépendance économique à l’égard de la Chine étant bien souvent le premier levier utilisé. La coercition économique chinoise prend des formes extrêmement variées : déni d’accès au marché chinois, embargos, sanctions commerciales, restrictions aux investissements, contingentement du tourisme chinois dont dépendent certaines régions, organisations de boycotts populaires. Pékin fait de plus en plus de la censure un prérequis pour l’accès à son marché. Et beaucoup d’entreprises finissent par plier sous la pression.

– la politique, avec l’objectif de pénétrer les sociétés cibles afin d’influencer les mécanismes d’élaboration des politiques publiques. Entretenir des relations directes avec des partis et des personnalités politiques influentes permet d’infiltrer les sociétés cibles, de recueillir des soutiens officiels et officieux, et de contourner d’éventuels blocages au sein du pouvoir en jouant sur des personnalités politiques de l’opposition ou à la « retraite ». Pékin pratique également l’ingérence électorale (au cours de la dernière décennie, la Chine se serait ingérée dans au moins 10 scrutins dans 7 pays).

– l’éducation, d’abord et en premier lieu via les universités, qui sont l’une des principales cibles des efforts d’influence du Parti. Ses principaux leviers sont la dépendance financière, engendrant de l’autocensure dans les établissements concernés ; la surveillance et l’intimidation, sur les campus étrangers, des étudiants chinois, mais aussi des enseignants et administrateurs de l’université, pour faire modifier le contenu des cours, le matériel pédagogique ou la programmation d’événements ; et le façonnement des études chinoises, en incitant à l’autocensure et en punissant les chercheurs critiques. Le Parti-État utilise également les universités pour acquérir des connaissances et des technologies, par des moyens légaux et non dissimulés comme des programmes de recherche conjoints, ou des moyens illégaux et dissimulés comme le vol et l’espionnage. Dans un contexte de fusion civilo-militaire, certains programmes conjoints ou des chercheurs cumulant des postes dans des dizaines d’universités occidentales aident involontairement Pékin à construire des armes de destruction massive ou développer des technologies de surveillance qui serviront à opprimer la population chinoise – plusieurs scandales ont éclaté en 2020 et 2021.

Enfin, il existe un autre acteur important de l’influence chinoise dans le domaine de l’éducation, qui est d’ailleurs lié aux universités : les instituts et classes Confucius qui sont implantés partout dans le monde et qui, sous couvert d’enseigner la langue et la culture chinoises, accroissent la dépendance voire la sujétion de certains établissements, portent atteinte à la liberté académique et pourraient aussi servir occasionnellement à faire de l’espionnage.

– les think tanks, la stratégie chinoise dans ce domaine étant duale, Pékin cherchant à implanter à l’étranger des antennes de think tanks chinois, et à exploiter des relais locaux qui peuvent être eux-mêmes des think tanks, avec trois cas de figure : les partenaires ponctuels servant de caisse de résonance sur les marchés des idées locaux, les alliés de circonstance qui travaillent avec le PCC de manière régulière et les complices qui partagent avec lui une vision commune du monde et dont les intérêts sont convergents.

– la culture, d’abord par la production et l’exportation de produits culturels, tels que les films et les séries télévisées, la musique ou encore les livres, qui sont de puissants vecteurs de séduction. L’influence s’exerce aussi sur les productions culturelles étrangères, notamment sur le cinéma, avec l’exemple d’Hollywood : pour ne pas contrarier Pékin et maintenir leur accès au gigantesque marché chinois, beaucoup de studios de cinéma américains pratiquent l’autocensure, coupant, modifiant des scènes, voire font du zèle, en donnant aux personnages chinois le « bon » rôle. Le déni d’accès au marché chinois est une pratique généralisée pour tous les artistes critiquant le Parti-État. Par d’autres types de pressions, Pékin espère également inciter les artistes à modifier leurs œuvres, ou ceux qui les montrent ailleurs dans le monde à cesser de le faire, voire à faire le travail des censeurs chinois.

– les manipulations de l’information, en créant de fausses identités pour diffuser la propagande du Parti dans les médias, en ayant recours à de faux comptes sur les réseaux sociaux, des trolls et de l’astrosurfing (pour simuler un mouvement populaire spontané), en utilisant un grand nombre de « commentateurs internet » (labellisés à tort « armée des 50 centimes »), payés pour « guider » l’opinion publique. En général contrôlés par l’APL ou la LJC, les trolls défendent, attaquent, entretiennent des polémiques, insultent, harcèlent. Une autre manière de simuler l’authenticité est de faire publier des contenus par des tiers, contre de l’argent (fermes de contenu, achat d’un message ponctuel, d’une influence sur un compte, d’un compte ou d’une page, ou recrutement d’un « influenceur »). Depuis 2019, Twitter, Facebook et YouTube n’hésitent plus à identifier des campagnes coordonnées comme étant originaires de Chine. Des dizaines de milliers de faux comptes ont ainsi été suspendus, certains « dormants » depuis longtemps, d’autres achetés ou volés, amplifiant la propagande chinoise et attaquant les États-Unis, en chinois et en anglais. Certains comptes ont des images de profil générées par intelligence artificielle – une pratique désormais régulièrement observée dans les opérations chinoises sur les réseaux sociaux. Un aspect important de ces campagnes est qu’elles ne se contentent pas de défendre la Chine : la promotion du modèle chinois passe par la dégradation des autres modèles, en particulier de celui des démocraties libérales, comme le font les opérations d’influence russes depuis des années. L’APL est au cœur de ces manœuvres : elle utilise les réseaux sociaux pour, d’une part, de l’influence « ouverte », en diffusant de la propagande, souvent à des fins de dissuasion et de guerre psychologique et, d’autre part, des opérations clandestines et hostiles contre des cibles étrangères.

– Parmi les autres leviers utilisés par Pékin dans ses opérations d’influence, figurent notamment des mouvements citoyens, en particulier indépendantistes (Nouvelle-Calédonie, Okinawa) et pacifistes (groupe No Cold War), les touristes chinois, les influenceurs, notamment les Youtubeurs occidentaux et les universitaires étrangers, mais aussi les otages puisque Pékin pratique une « diplomatie des otages ».

4. Les études de cas prennent la forme de cercles concentriques. Taïwan et Hong Kong constituent le premier front de la « guerre politique » de Pékin : ce sont des avant-postes, des terrains d’entraînement, des « laboratoires de R&D » des opérations chinoises, qui peuvent ensuite être affinées et appliquées à d’autres cibles dans le monde – comme la Géorgie et l’Ukraine ont pu l’être pour les opérations russes. La première étape de l’élargissement du cercle des opérations chinoises a porté sur l’Australie et la Nouvelle-Zélande. La seconde étape a porté sur le reste du monde, en particulier, mais pas seulement, l’Europe et l’Amérique du Nord. Cette partie présente quatre situations : Taïwan, Singapour, Suède, Canada – et deux opérations : celle ayant visé les manifestants hongkongais en 2019 et celle ayant cherché à faire croire à l’origine américaine de la Covid-19 en 2020.

Enfin, la conclusion revient sur ce « moment machiavélien » en deux temps. D’abord, pour confirmer qu’il s’agit bien d’une « russianisation » des opérations d’influence chinoises depuis 2017 environ : le parallèle avait déjà été fait en 2018 au moment des élections municipales taïwanaises, puis en 2019 lors de la crise hongkongaise, et c’est en 2020, pendant la pandémie de Covid-19, que le monde entier a pris conscience du problème. Cette russianisation a trois composantes, qui sont développées : Pékin s’inspire de Moscou dans plusieurs registres (et la littérature militaire chinoise reconnaît que, pour l’APL, la Russie est un modèle à imiter en la matière) ; il subsiste évidemment des différences entre les deux ; et il existe aussi un certain degré de coopération.

Ensuite, la conclusion cherche aussi à faire une évaluation de l’efficacité de cette nouvelle posture chinoise et conclut que, si elle implique certains succès tactiques, elle constitue un échec stratégique, la Chine étant son meilleur ennemi en matière d’influence. La dégradation brutale de l’image de Pékin depuis l’arrivée de Xi Jinping, en particulier ces derniers années, pose à la Chine un problème d’impopularité qui prend des proportions telles qu’il pourrait à terme indirectement affaiblir le Parti, y compris vis-à-vis de sa propre population.

Source: https://www.irsem.fr/

Le régime communiste chinois exportera son horrible pratique de prélèvement forcé d’organes dès qu’il sera en mesure de briser les normes éthiques établies par les pays occidentaux en matière de transplantation, avertit le Dr Torsten Trey.

Le Dr Torsten Trey, fondateur et directeur exécutif des Médecins contre le prélèvement forcé d’organes (DAFOH), a lancé cet avertissement lors d’un récent entretien accordé à l’émission « Crossroads » d’EpochTV. Il a expliqué comment le régime chinois persécute depuis des décennies les prisonniers d’opinion pour alimenter en organes le marché des transplantations.

Compte tenu des ambitions de la Chine qui souhaite dominer de nombreux secteurs, M. Trey estime que Pékin cherche également à devenir le leader de la transplantation.

« Dans les pays occidentaux, nous suivons des normes éthiques bénéfiques pour le patient. Tout cela est prémédité et implique un temps d’attente », déclare-t-il. « Tout repose sur le consentement libre et volontaire qui sert de base au don d’organes. »

Il ajoute : « Ce concept du consentement libre et volontaire est fondamentalement anéanti quand il est question de prélèvement forcé d’organes. »

En d’autres termes, le régime chinois considère les normes médicales occidentales comme une menace pour sa pratique du prélèvement forcé d’organes.

« La Chine est donc très intéressée par le démantèlement du système [occidental] pour faire du prélèvement forcé d’organes la norme standard de la médecine de transplantation », précise-t-il.

La Chine est l’une des principales destinations du tourisme de transplantation, car les hôpitaux chinois proposent des transplantations d’organes avec des temps d’attente très courts, tout en affirmant que les organes proviennent tous du système de dons volontaires du pays. Pékin affirme ne plus s’approvisionner en organes auprès de prisonniers exécutés depuis 2015.

Cependant, un tribunal populaire basé à Londres a démenti l’affirmation du PCC dans un rapport publié en 2019. Il a conclu que la pratique déclarée et sanctionnée du prélèvement forcé d’organes se poursuivait à une « échelle significative » en Chine, les pratiquants de Falun Gong étant la principale source d’organes.

Les pratiquants du Falun Gong, discipline spirituelle également connue sous le nom de Falun Dafa, sont la cible de persécutions perpétrées par le régime chinois depuis 1999.

Les allégations de prélèvements forcés d’organes sur des pratiquants de Falun Gong détenus sont apparues pour la première fois en 2006.

Une fois que la Chine sera devenue le principal acteur du secteur des transplantations, elle établira ses « nouvelles normes », insiste M. Trey.

À l’époque, M. Trey avait prévenu que Pékin poursuivrait « sans aucune restriction l’éradication » des prisonniers de conscience s’il n’y avait ni examen ni critique de la part de la communauté internationale.

Torsten Trey déclare avoir eu la chance de parler à plusieurs personnes qui ont failli être victimes des prélèvements d’organes forcés pratiqués par la Chine ces dernières années.

Certains d’entre eux avouent avoir subi des analyses de sang à plusieurs reprises pendant leur incarcération en Chine. Un ancien détenu a déclaré qu’en lui imposant un test sanguin, la police lui avait fait savoir que ses organes pourraient être prélevés.

De plus, M. Trey a également pris connaissance de rapports faisant état d’organes manquants sur les corps de détenus morts en Chine.

En 2016, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté à l’unanimité la résolution H.Res.343, qui appelle à mettre fin à la pratique des prélèvements d’organes par le régime chinois.

Au mois de mars, une nouvelle législation a été introduite à la fois au Sénat (S.602) et à la Chambre (H.R.1592) pour lutter contre le prélèvement forcé d’organes et la traite des êtres humains. Si elle est approuvée, elle autorisera le gouvernement américain à refuser ou à révoquer le passeport des personnes qui se livrent à l’achat illégal d’organes. Elle interdira également l’exportation par les États-Unis du matériel chirurgical de transplantation d’organes vers des entités étrangères associées à ce crime.

Des soutiens internationaux ont appelé la Chine à mettre fin à la pratique du prélèvement forcé d’organes. Selon M. Trey, son organisation a mis en place une pétition mondiale pendant six ans qui s’est terminée au cours de l’année 2018, recueillant plus de 3 millions de signatures et demandant au Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme d’aider à mettre fin à cette pratique sur le territoire chinois.

« Nous voulons maintenant que les Nations unies et des enquêteurs indépendants aillent sur le terrain, dans ces camps en Chine » pour mener une enquête, déclare M. Trey.

Frank Fang est journaliste à Taïwan. Il traite de l’actualité en Chine et à Taïwan. Il est titulaire d’une maîtrise en science des matériaux de l’université Tsinghua à Taïwan.

Source: https://fr.theepochtimes.com/le-prelevement-force-dorganes-pratique-par-le-regime-chinois-pourrait-setendre-a-dautres-pays-constate-le-directeur-dune-ong-1840107.html